« Dune du Pilat 6 » by pierre.boisselet is licensed under CC BY 2.0

J’abordais dans un précédent article et dans une vidéo la Dune du Pilat et son inexorable avancée dans la forêt testerine.
Cette forêt que l’on oublie bien vite une fois la montagne de sable gravie a pourtant une histoire toute particulière et une spécificité qui est désormais unique aujourd’hui.

En effet, elle est la dernière forêt usagère en France. Mais qu’est-ce qu’une forêt usagère ?

Au Moyen-Age, les Seigneurs avaient accordé aux habitants de leur captalat (ou territoire) certains droits tout en tenant compte de leurs statuts à savoir s’ils étaient propriétaires de parcelles ou non.

Pour les « non-ayants-pins » (les non-propriétaires), les droits étaient limités au ramassage du bois mort pour se chauffer et à celui du bois vert en vue de future construction.
Tout cela devait se pratiquer « en bon père de famille ». Autrement dit, dans des quantités raisonnables et en assurant la régénération des arbres.

Pour les « ayants-pins » (les propriétaires), ils disposaient en plus d’un droit dit de gemmage. C’est-à-dire qu’ils pouvaient extraire la résine des pins et en faire commerce moyennant une redevance.

De nos jours, ce droit d’usage s’applique toujours à condition de vivre sur les terres de l’ancien captalat depuis au moins 10 ans. L’extraction de résine, elle, a disparu et a rendu plus aléatoire l’entretien des sous-bois.

On distingue encore par endroits quelques traces de cette activité telles que les anciennes cabanes ou les « pins bouteilles », ces pins qui à force d’être utilisés pour obtenir de la résine ont cicatrisé et gagné en volume à leur base créant ainsi des troncs en forme de bouteille.

Mais la disparition des exploitations de résine a créé un véritable déséquilibre.

Si les « non-ayants-pins » ont conservés leurs privilèges, les « ayants-pins » se sont retrouvés sans revenus à tirer de ces conifères autrefois surnommés « arbres d’or » tant la résine fut rentable. En plus de cela, ils ont dû continuer à accepter que les « non-ayants-pins » continuent à se servir librement sur leurs parcelles.

Terrible désavantage accrut par le fait que les « ayants-pins » non-résidents n’avaient même plus le droit de se servir eux même en bois du fait de leur éloignement géographique.

La problématique est plus que jamais d’actualité. 

A l’heure où les terrains s’envolent à prix d’or dans la région, chacun souhaite y trouver son compte.

Si l’on peut comprendre les différents partis, il est néanmoins important de conserver et protéger cette forêt unique

Sans elle, le terme de forêt usagère disparaîtrait. Également, sa richesse botanique et primitive, sa biodiversité ne se retrouverait jamais ailleurs.

Les récents incendies qui touchent la forêt de la Teste de Buch (été 2022) sont pour ces mêmes raisons un véritable drame. Sur 3800 hectares d’une forêt qui se régénère depuis environ 2000 ans, 1300 ont déjà été dévorés par les flammes en tout juste 24h. Reste à espérer que les efforts des pompiers parviendront à dompter les flammes malgré des conditions peu favorables.

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